La pression commerciale explose avec la multiplication des points de contact. Saviez-vous que 98 % des 12 ans et plus sont équipés d’un téléphone mobile en France (chiffres 2024 de l’Arcep) ? Voilà qui élargit brutalement la surface d’exposition aux messages des marques. Dans le même temps, la CNIL a reçu 17 772 plaintes en 2024, +8 % en un an, un signal clair d’exaspération face aux sollicitations mal calibrées. Côté canaux, le SMS marketing bat un record avec 14,2 milliards d’envois en 2024, +6 % par rapport à 2023. La question n’est donc plus « comment toucher » mais « comment ne pas trop toucher ».

Redéfinir la pression marketing à l’ère multicanale

Email, application mobile, notifications push, messageries, réseaux sociaux, SMS, retargeting, et même des points de vente connectés… la pression ne vient plus d’un canal isolé mais de l’accumulation.

Une newsletter qui atterrit la même journée qu’une notification et qu’un SMS « dernière chance de profiter de cette réduction de 10 % sur le robot-tondeuse Tartenpion » transforme une bonne intention en friction. Les chiffres cités plus haut fixent le décor : un parc quasi universel de smartphones d’un côté et une capacité d’envoi quasi illimitée de l’autre…

Sans pilotage transversal, c’est clairement la foire.

Chaque équipe optimise « son » KPI local au détriment de l’expérience globale, avec à la clé des désabonnements, de la lassitude et un risque réglementaire accrus (tant qu’à faire).

Présentation rapide et gouvernance dans les Customer Engagement Platform : règles globales, priorités par « moments de vérité », capping partagé

Si la pression naît du cumul, la réponse ne peut pas être locale. Il faut une sorte « d’organe central » qui arbitre qui parle, quand et combien. Et c’est précisément le rôle d’une CEP… bien gouvernée.

Car oui, une Customer Engagement Platform (CEP) n’a d’impact que si elle s’accompagne d’un cadre commun :

  • D’abord, des règles globales de contact : fenêtres horaires autorisées, exceptions limitées pour les messages de service (suivi de commande, sécurité) et plafonds par personne sur une période donnée.
  • Ensuite, des priorités par « moments de vérité » : incident de livraison, renouvellement, réclamation, activation d’un service. La parole de la marque se concentre là où elle résout un problème concret, pas là où elle rajoute du bruit.
  • Enfin, un capping partagé entre canaux : un compteur unique empêche l’email de trop après un push déjà envoyé, ou le SMS superflu lorsqu’une interaction satisfaisante vient d’avoir lieu dans l’app.

Les CEP modernes exposent justement des fonctions d’orchestration temps réel, de décision et de diffusion multicanale. L’effet de levier naît quand ces briques servent un jeu de règles commun plutôt que des silos applicatifs.

Apport de l’IA : détection de fatigue, tempo individuel, arbitrage « s’abstenir » vs « pousser »

Alors bien sûr, des règles communes posent le cadre, mais elles ne suffisent pas à suivre le rythme réel des clients. L’IA prend ici le relais en ajustant le tempo, en captant la fatigue et sait parfois choisir le silence utile.

Elle permet de lire les signaux faibles d’épuisement relationnel comme la baisse de la réactivité, le raccourcissement du temps d’attention, les visites répétées de la page X ou la hausse des désabonnements après certaines campagnes. Une CEP enrichie de modèles de propension peut espacer automatiquement les prises de parole auprès des profils fatigués et privilégier des interactions de service plutôt que promotionnelles. La même logique sert le tempo individuel. Au lieu d’imposer une cadence fixe (hebdomadaire pour tous), l’algorithme apprend le rythme auquel chaque personne reste réceptive. Surtout, ces plateformes introduisent un droit d’abstention. Si la probabilité d’un gain réel est faible et que le risque de dégradation de l’expérience est élevé, la meilleure action consiste… à ne pas envoyer. Ce choix de « ne rien faire » devient un signal métier à part entière, documenté et mesurable, au même titre qu’un envoi.

KPI utiles : incrémentalité, coût relationnel, NPS post-contact, LTV protégée

Et pour rendre cette sobriété actionnable, il faut des indicateurs qui distinguent l’impact réel du simple bruit.

Piloter la « sobriété relationnelle » suppose de déplacer le regard au-delà des ouvertures et des clics. L’incrémentalité mesure ce que la communication ajoute vraiment par rapport à un scénario sans contact : groupes témoins, « holdout » géographiques ou temporaires, comparaison rigoureuse des conversions évitées et provoquées. Le coût relationnel agrège le coût d’envoi et les externalités telles que les désabonnements, les blocages, sollicitations au service client, et autre exposition au risque CNIL (en cas de dérive).

Un NPS post-contact ciblé sur les moments de vérité relie la perception à la nature du message et à son timing. Il permet d’objectiver une réalité simple : un message utile rehausse l’expérience, un message de trop l’abîme.

Enfin, la LTV protégée suit sur 12–24 mois l’effet d’un capping et d’une politique d’abstention. L’objectif n’est pas « plus de clics cette semaine », mais moins d’érosion à moyen terme.

La CNIL rappelle d’ailleurs que, dans les services aux particuliers, la résolution efficace après contact pèse directement sur la perception. Transposé au marketing, l’ajustement du rythme suit la même logique…

Quelques exemples de solutions CEP sur le marché

Une fois le cadre théorique et les métriques posés, reste à outiller la démarche. Et là, plusieurs choix s’offrent à vous. De nombreuses plateformes couvrent ces besoins d’orchestration et de décision, et le choix se fait autant sur les fonctionnalités que sur la capacité à appliquer vos règles de sobriété.

Le marché s’est notamment structuré autour de plateformes capables d’orchestrer les parcours et de piloter la pression comme les « géants » Adobe Journey Optimizer, Braze ou SAP Emarsys. Mais d’autres solutions françaises, comme la Customer Engagement Platform d’imagino, se positionnent aussi sur cet enjeu « d’engagement optimal ».

Au-delà du « qui fait quoi », l’important reste la mise en œuvre : profil unifié, gouvernance de pression, politique d’abstention, tests d’incrémentalité, et un suivi causale des KPI. Sans cela, la meilleure brique technique ne suffira pas. A vous de faire le bon choix en fonction de vos usages…